Un prototype de robot ou « pilotage automatique » qui endort tout seul le malade, a été mis au point dans un hôpital de la région parisienne et testé sur plus de 200 patients en France et en Europe, a indiqué le spécialiste à l’origine de cette innovation.
Ce prototype, a été développé par le professeur Marc Fischler, chef du service d’anesthésie-réanimation de l’hôpital Foch de Suresnes, avec les docteurs Thierry Chazot et Ngai Liu, grâce au financement de cet hôpital privé à but non lucratif.
Pendant l’anesthésie, il faut administrer les médicaments anesthésiques, comme les hypnotiques pour endormir et les morphiniques pour la douleur, les plus délicats à manoeuvrer, et assurer la surveillance du malade.
« Ce pilotage automatique libère d’une tâche, le professionnel peut se consacrer à la surveillance du malade qui est extrêmement importante« , explique le Dr Fischler.
Dans l’essai en cours, ce pilotage automatique a servi à plus de 200 patients dans plus de dix centres en France (CHU Angers, Tours, Besançon, cliniques à Bordeaux et Amiens, hôpitaux généraux à Argenteuil et Dreux, Centre anti-cancéreux Paoli-Calmette à Marseille…) ainsi que dans un centre en Belgique et un en Allemagne.
Plus d’informations sur le robot anesthésiste BIS testé en France dans la suite …
« On n’a pas inventé le concept mais on l’a développé, et nous sommes les seuls au monde à avoir fait l’induction (le début) de l’anesthésie avec ce système, en plus de son maintien au cours de l’opération. Nous sommes aussi les seuls à l’utiliser pour délivrer automatiquement les morphiniques en plus des hypnotiques« , précise-t-il. « De surcroît, nous prenons des malades de toutes gravités et même des opérations longues (jusqu’à 14 h)« . « Notre valeur ajoutée, c’est le logiciel« , dit-il.
Le système comprend un moniteur « bispectral », mis au point aux Etats-Unis il y a quelques années, qui analyse la profondeur de l’anesthésie à partir de l’enregistrement de l’activité électrique du cerveau (l’électro-encéphalogramme). « Une électrode sur le front qui capte les ondes du cerveau, permet au moniteur de situer la profondeur du sommeil artificiel entre 0 (absence d’activité cérébrale) et 100 (éveil constant), selon l’ »index bispectral (BIS)« , poursuit-il.
À partir de cet appareil, les médecins français ont développé un logiciel, relié à deux seringues électriques, qui contrôle automatiquement la quantité d’hypnotique et de morphine à fournir au patient afin de l’amener au degré d’anesthésie désiré. D’un seul coup d’œil, le médecin peut voir la quantité de drogue fournie au patient, de même que la «profondeur» de son sommeil. En d’autres termes, la manipulation des drogues et des seringues est laissée au robot pendant que le médecin peut veiller à la sécurité du malade et à ses signes vitaux.
Les données arrivent donc dans l’ordinateur qui commande les seringues de morphine et d’hypnotique, le tout sous contrôle permanent des médecins anesthésistes. En même temps, le capteur de l’activité musculaire spontanée (EMG) affiche une «descente» au fur et à mesure que la seringue électrique injecte le produit paralysant les muscles. Lorsque le malade est totalement relaxé, l’anesthésiste peut introduire dans les voies aériennes supérieures du malade un tube. Il sera branché sur le ventilateur qui va assurer la respiration artificielle pendant l’opération.
« Entre 40 et 60, on considère que l’anesthésie est satisfaisante« . Le BIS descend si la dose est forte, mais il peut aussi servir d’alerte et descendre encore si quelque chose ne va pas bien (accident vasculaire par exemple). Il permet d’apprécier le « bien être cérébral » ou au contraire de signaler un mal être majeur, ajoute ce spécialiste.
« On peaufine notre version depuis quatre ans. A court terme, c’est un outil de recherche et un projet de recherche biomédicale, mais je n’imagine pas qu’à moyen terme cela ne devienne un outil d’utilisation très banale« , commente le Pr. Fischler.